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Gérard Bonneau, l'homme de l'ombre

Le 22.05.2018 par NSOL31

Gérard Bonneau a annoncé ce mardi qu'il quittait l'Olympique Lyonnais pour rejoindre le Servette FC, en Suisse. Retour sur le passage à Lyon de celui qui a été un des bâtisseurs de l'excellence lyonnaise chez les jeunes joueurs.

L'ancien pro... ou presque

C'est en février 2000 que l'histoire d'amour entre l'Olympique Lyonnais et Gérard Bonneau commence. Il vient alors de quitter un poste de Conseiller Technique Fédéral à la Ligue du Rhône de Football. Son parcours footballistique s'arrête à peu près là, si ce n'est une assez courte expérience d'entraîneur à La Duchère. Il entraîne en effet le club du Plateau pendant deux ans, de 1992 à 1994. Dans le monde du football professionnel, surtout en France, priorité est donnée aux anciens joueurs. Quand on ne vient pas du milieu, il est beaucoup plus difficile de se faire un trou. Alors quand il arrive à Lyon, un peu de scepticisme l'entoure. Mais très vite, par un travail acharné jour après jour, Gérard Bonneau arrive à faire oublier qu'il n'a pas été footballeur au haut niveau. D'abord éducateur, il gravit peu à peu les échelons jusqu'à atteindre son Graal à lui. Son poste ? Responsable de recrutement des jeunes. La base de l'Institution Olympique Lyonnais.

Formé au centre technique national de Clairefontaine, Gérard Bonneau a appris à découvrir les talents du football. Sa méthode est très simple mais chirurgicale. Le recrutement s'organise à trois niveaux : régional, national et européen. Ainsi, malgré les réglementations de l'UEFA sur les transferts de joueurs mineurs, il attire à Lyon Ulrich Jenssen ou Tord Salte. Au niveau national, il axe sa stratégie autour des foyers de population principaux : Paris, Lyon et Marseille. Comme le TGV, il fait régulièrement des arrêts dans les trois grandes villes françaises, et y déniche les principaux talents entre onze et seize ans, principalement dans des clubs partenaires. Pour les plus jeunes, c'est à Lyon que tout se passe : à l'aide de détections, il supervise avec son staff d'une quinzaine de personnes, de manière régulière, les jeunes talents de la région.

Racines

Mais Gérard Bonneau assoit surtout sa légitimité à Lyon en proposant des véritables projets de vie aux jeunes joueurs. À une heure où le football business fait de plus en plus des footballeurs des machines, il propose une approche humaine aux familles des joueurs. Son travail est en étroite relation avec les cellules psychologiques du club, mais aussi avec les enseignants. Car le jeune footballeur est soumis aux aléas du monde professionnel, et doit se construire un projet de vie hors du football. La politique de l'Olympique Lyonnais et de Gérard Bonneau est donc humaine : pas trop d'argent chez les jeunes.

"Il y a de la concurrence entre des clubs qui ont des politiques différentes. Certains sont prêts à injecter de l'argent très vite. Il y a déjà beaucoup d'argent en jeu mais ce n'est pas la politique du club [...] Il y a beaucoup d'humain, on a cette sensibilité. Notre cadre est parfait et familial... Il faut garder notre identité. On a un savoir-faire connu et reconnu. L'objectif est de consolider nos valeurs et d'exporter ce modèle... on a toujours su former. Il faut rester fidèle à nos convictions".

Tant pis s'il faut passer à côté d'un jeune extrêmement talentueux, la mentalité des joueurs est primordiale. Et plus importante que l'aspect physique. En effet, à l'Olympique Lyonnais, sous la houlette de Gérard Bonneau, le recrutement ne se base que peu sur les critères physiques, à part pour le gardien de but. La méthode Moneyball l'a bien prouvée : les joueurs de fin d'année sont souvent désavantagés, car ils sont en moyenne moins fort physiquement. Mais ça, l'OL l'a bien compris : un jeune en avance physiquement pour son âge ne gardera sans doute pas cette avance une fois passé pro.

La bande à Bonneau

Ce qui n'empêche pas Gérard Bonneau de faire quelques erreurs. Sa plus grosse ? Avoir oublié Antoine Griezmann. Car Gérard Bonneau avait un regard sur le mâconais, mais visiblement pas assez acéré.

"Nous le suivions depuis trois mois. On le faisait venir régulièrement. Mais dans cette génération 91, nous avions un groupe fourni notamment sur le secteur offensif et nous venions de faire signer Yanis Tafer. Nous avons hésité."

Cependant, cet échec sur le dossier Griezmann est contrebalancé par de nombreuses réussites : Martial, dégoté en région parisienne, tout comme Myziane, en sont des illustrations. Mais la plus grande réussite de la carrière lyonnaise de Gérard Bonneau est sans doute l'actuel capitaine de l'Olympique Lyonnais, Nabil Fekir. Non conservé par l'OL à treize ans, il fait ses preuves dans les clubs de la région, notamment à Saint-Priest. Mais Gérard Bonneau conserve un regard précis sur les joueurs "lourdés" pas le club. Et, après un forcing auprès de sa direction, il n'a aucune difficulté à convaincre Nabil de rejoindre à nouveau l'OL. Pour la réussite que l'on connaît.

Avec le départ de Gérard Bonneau, c'est donc toute une page de l'histoire de l'Olympique Lyonnais qui se tourne. Michel Rouquette et Florian Maurice sont les premiers à en faire les frais : en effet, il était depuis l'été dernier affecté au scouting plus général des jeunes joueurs. Quoiqu'il en soit, sa signature en Suisse ne peut être qu'une bonne nouvelle pour le Servette. Souhaitons-lui une réussite digne de ses années lyonnaises !

À propos de l'auteur

Cet article a été rédigé par NSOL31, membre du Café du Commerce OL.