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Monsieur Gérard

Le 14.12.2020 par NSOL31

Le décès de Gérard Houllier, à l'âge de 73 ans, laisse tout le peuple lyonnais dans le désarroi.

Il y a des Hommes qui veulent marquer le monde de leur empreinte, et puis il y a des Hommes qui marquent le monde de leur empreinte. Gérard Houllier, disparu le 14 décembre 2020 au matin, était de la seconde catégorie. Charismatique entraîneur d'un des plus beaux Olympique lyonnais de l'histoire, natif de Thérouanne, au plus profond du Pas-de-Calais, entre Saint-Omer et Aire-sur-la-Lys, sa disparition laisse un grand vide dans le cœur des amateurs de l'OL.

Pas comme les autres

Nombreux sont les entraîneurs qui ont déferlé sur notre football depuis sa création, mais rares sont ceux que l'on pleure presque comme des membres de sa propre famille. Si certains d'entre eux ont marqué le football par des idées novatrices, par des fondamentaux de jeu que l'on ne saurait oublier, d'autres, comme Gérard Houllier, on marqué le football en plein milieu par quelques soubresauts de romantisme. L'histoire de Gérard Houllier, c'est d'abord l'histoire de M. Houllier, un professeur d'anglais pas comme les autres. Un professeur d'anglais qui est parti deux fois à Liverpool, deux fois pour y enseigner, mais une seule fois pour la langue, l'autre, pour le football. L'histoire passe des cahiers de grammaire aux terrains de football quand, justement, il prend conscience qu'il ne jouera jamais à ce sport à son plus haut niveau, mais que son intelligence lui permettra de faire de grandes choses avec d'autres que lui pour taper le ballon.

L'histoire d'entraîneur, tout le monde la connaît. D'abord, au Touquet, où il entraîne à un niveau amateur, puis à Noeux-les-Mines, en deuxième division ; à Lens, en première division ; et puis à Paris, où il remporte le premier titre du club de la capitale. On connaît tous ce passage douloureux à la tête de l'équipe de France, suivi de belles années en tant que DTN, jusqu'à l'aube de la Coupe du Monde 1998. Si le destin le rend malheureux avec les Bleus, il lui offrira la gloire avec les "Rouges" de Liverpool. Pendant six années, il couvera Carragher, lancera Gerrard, fera briller Owen et attirera Heskey. Et puis, en 2001, un anévrisme disséquant en plein milieu d'un match contre Leeds le fera sursauter. C'est à Lyon qu'il rebondira, un an après son départ de Liverpool, pour deux années splendides de succès, deux records de points pour le club. Pour la fin de sa carrière d'entraîneur, cela sera à nouveau sa santé qui sera en question, notamment pour son départ d'Aston Villa. 

M. Houllier, devenu peu à peu Gérard, s'éloigne du terrain et prend de la hauteur. En tant que DTN français, juste avant Aston Villa, puis en tant que Directeur Sportif du Groupe Red Bull. Houllier est alors un des principaux acteurs de la stratégie formidable de croissance, sur tous les continents, du groupe ailé, de 2012 à 2016. Il reviendra à Lyon par la petite porte, en tant que conseiller spécial du président Aulas. Sa mort, brutale, soudaine, violente, surprend toute l'institution lyonnaise et plonge l'ensemble du club dans un deuil sans précédent.

La plume et le ballon

Monsieur Gérard, c'est avant tout une époque qui s'éteint. L'époque d'un OL flamboyant, où pas un joueur ne faisait semblant, au risque de perdre sa place dès le match suivant. C'est l'époque d'un OL flambant, qui, en Europe, ne tombe que sous les coups du sort et sur des scénarios affreusement douloureux. C'est aussi ce temps merveilleux, où, non content d'être la meilleure équipe du championnat, l'OL a aussi le meilleur entraîneur du pays à sa tête ; le seul avec Paul Le Guen à avoir remporté le trophée UNFP de meilleur entraîneur de Ligue 1 à la tête de l'OL durant le septennat lyonnais. 

Et puis, outre le football, il y a aussi cette dignité dont Houllier fut entouré pendant ces deux années, si courtes et si merveilleuses, à la tête de l'Olympique lyonnais. Ces choix assumés, cette façon de dire au football oui. Et puis aussi ce courage unique de venir entraîner, de montrer que l'on sait entraîner, alors que l'on n'a jamais été joueur de football professionnel. Comme une manière triomphale de marquer que l'intelligence est, toujours, partout, tout le temps, capable de triompher des préjugés, des on-dit, des manières de penser. Gérard Houllier a su franchir des barrières, pour montrer à tous qu'il est une de ces formidables personnes capables, dans la victoire comme dans la défaite, d'être, de rester et de devenir profondément humain.

La mort, et la douleur apportée par celle-ci, est double. Car en plus de la douleur de perdre quelqu'un qui a été si proche et si loin de nous pendant tant d'années, il y a aussi celle de voire une époque mourir. Une époque merveilleuse, une époque fabuleuse, qui s'effondre devant nous. C'est l'enfance, l'adolescence, la jeunesse de beaucoup qui s'efface. C'est le temps qui balaie les larmes qui coulent le long des joues des anciens. Quelques Hommes ont marqué l'histoire de l'Olympique lyonnais, et Gérard Houllier en fait partie. Merci, Monsieur Gérard, et reposez en paix.

À propos de l'auteur

Cet article a été rédigé par NSOL31, membre du Café du Commerce OL.