Peur de son ombre
Le 11.11.2023 par NSOL31En rendant une décision qui la dédouane de toute responsabilité, la LFP passe quasiment sous silence les agissements des supporters marseillais ayant causé de graves blessures à Fabio Grosso. A-t-elle peur de son ombre pour se cacher comme cela ?
Le courage en option
C'est une vérité bien connue : la LFP, et plus globalement les instances décisionnaires du football français, de l'arbitrage à la fédération en passant, donc, par la ligue, n'ont pas beaucoup de courage. On ne compte plus le nombre de décisions rendues sous la pression de l'opinion publique - à tort ou à raison - ou bien sous celle, plus insidieuse, des pouvoirs publics. On ne compte pas non plus les décisions absurdes des arbitres confirmées en commission de discipline par la LFP. Ces faits valent pour tous les clubs ; l'Olympique lyonnais, bien sûr, mais toutes les autres institutions des championnats professionnels. Pensez par exemple à ce carton rouge absurde délivré à Edinson Cavani lors d'un match contre Lens pour une célébration ; aux fautes infirmées par la VAR mais aux cartons maintenus par les arbitres comme ce fut le cas pour un club bien connu du Sud-Ouest de la France ; au rouge de Marcelo contre Angers maintenu malgré l'erreur manifeste de l'arbitre sur l'interprétation du geste du défenseur lyonnais... Bref, dans les instances dirigeantes du football en France, on ne brille pas vraiment par le courage.
Mais surtout, ce qui semble cruellement manquer aux pontes du sport roi dans notre pays, c'est bien l'esprit de logique. Songez donc aux chants des lyonnais anti-stéphanois après la victoire en Coupe de France en 2012, des faits commis en dehors du stade : les joueurs avaient été sanctionnés par des matchs fermes de suspension. Cette année, lorsque quatre joueurs du PSG ont proférés des chants insultants à l'encontre de Marseille, dans le stade, ils n'ont été sanctionnés que par du sursis. Loin de vouloir victimiser l'OL, cette situation n'est qu'un exemple parmi tant d'autres, qui parlera particulièrement aux supporters de l'OL et aidera certainement le lecteur à comprendre que les décisions des instances régulatoires du football français sont tous sauf logiques. Mais jusqu'à présent, à défaut d'avoir du courage ou de la cohérence, les choix de la LFP avaient le goût de chercher à minimiser les risques, quels qu'ils soient.
Le dégoût
Mais en choisissant de ne prendre aucune décision - de se déclarer incompétente - à propos des inacceptables incidents survenus à Marseille, la LFP a fait le choix le moins compréhensible qu'il soit. Le football français sait sanctionner des incidents survenus en dehors d'un stade, il l'a prouvé... à l'encontre de l'OL, par exemple dans ledit évènement en 2012 après la finale de Coupe de France. Mais là n'est même pas le débat. La Ligue devrait avoir pour premier impératif de protéger la santé, l'intégrité physique et morale des acteurs du jeu, qu'ils soient joueurs, entraîneurs ou supporters. C'est d'ailleurs un argument qui avait été porté lors du fameux jet de Cristalline sur Dimitri Payet, mais c'est aussi un argument qui prévaut quand il s'agit par exemple d'interdire l'entrée de fumigènes en tribune. Et, on ne peut le contester, il est absolument nécessaire de maintenir cette protection fondamentale envers toute personne participant à ce magnifique moment qu'est un match de football.
Et il est probablement nécessaire de sanctionner, fortement et fermement, les clubs pour les actes commis par leurs supporters. Pourquoi ? Parce que c'est un des seuls moyens de rendre visible les sanctions. Car les individus en tant que tels ont beaux être sanctionnés, cela n'est pas dissuasif pour de nouveaux délinquants - une simple cagoule et il est bien difficile d'identifier clairement quelqu'un. Alors qu'une sanction numéraire et surtout numérique au classement, ou bien une fermeture de stade, sont des choses facilement compréhensibles. Il est important de se souvenir que les coupables de tels actes honteux sont souvent, il n'y a pas d'autres mots, profondément stupides. Et ce genre de personnes ne comprennent qu'une seule chose : ce qu'ils voient.
Ce n'est, visiblement, pas la décision que la LFP a choisi de prendre concernant l'affaire Fabio Grosso. De façon incompréhensible, la ligue a décidé de faire comme si rien ne s'était passé, avec un pouvoir politique au positionnement questionnable sur l'affaire - comme bien souvent lorsqu'il s'agit de football. Ce faisant, elle refuse de voir qu'elle donne ainsi un blanc-seing aux violences des supporters sur les joueurs, dès lors qu'ils ont lieu en dehors du stade. Il ne s'agit pas spécifiquement de l'Olympique de Marseille, mais de tous les supporters en général : au vu de cette décision, plus rien n'empêche un supporter de l'Olympique lyonnais peu futé - et il y en a, bien plus que de droit - de se venger pourvu qu'il soit dûment cagoulé, et de balancer, pourquoi pas, en plus d'un parpaing, une charge explosive sur le car de l'OM au match retour. En refusant de prendre la moindre décision, la LFP dit oui à la violence et oui à la honte.