Pourquoi la défense à trois reste une bonne idée
Le 19.10.2019 par MatthiasTAlors que l'échec de Sylvinho pour relancer l'OL avec un 3-5-2 a compris l'utilisation d'un tel système à Lyon, voyons pourquoi, malgré tout, une formation à trois défenseurs centraux reste une bonne idée et un système tout à fait exploitable dans la capitale des Gaules.
Des individualités libérées…
Contrairement à une idée reçue, aligner un système à trois centraux n’est pas un choix d’abandonner le jeu et de « bétonner ». Si c’était le cas, la Bundesliga serait le championnat le plus défensif d’Europe. C’est bien l’animation mise en place qui caractérise les intentions de l’entraîneur envoyant cinq défenseurs parmi ses hommes. Ainsi, le troisième axial est bien souvent le garant d’une cohorte d’offensifs décomplexés. Pour l’OL, force est de constater que l’utilisation récente de système ne répondait pas à une défense poreuse mais à une attaque en peine de créativité. Avec sa philosophie étonnante qui poussait les latéraux à rester derrière au sein d'un 4-3-3, Sylvinho assurait certes une solide assise défensive, mais au détriment d’une armada offensive esseulée.
De fait, la première fonction de ce troisième axial introduit est de libérer les latéraux dont la montée vers le front est désormais possible et surtout encouragée. Bien que Sylvinho poussait une frilosité à l’extrême, le fait que les latéraux d’un 3-5-2 soient plus libres que ceux d’un 4-3-3 reste valable pour toutes les équipes. Évidemment, cette liberté offensive retrouvée offre davantage de personnel en attaque, des possibilités de combiner dans les intervalles ou de dédoubler sur l’extérieur : impensable avec la défense à quatre observée jusqu’alors cette saison. De plus, ces instructions tactiques sont indéniablement plus plaisantes pour nos défenseurs latéraux. Et la notion de plaisir pris et de signification attribuée aux efforts se révèle très importante au sein d’un groupe, même si cela ne concerne que quelques joueurs. D’autant plus quand l’un d’eux est le vice-capitaine, quand le nouvel entraîneur doit construire une confiance autour de lui et quand le groupe traverse une mauvaise passe.
… et d’autres optimisées
Une fois les latéraux rassurés, il est donc temps d’évoquer les hommes auxquels on pense en premier en traitant de ce dispositif : les défenseurs centraux. Dans le cas de ce groupe lyonnais, le 3-5-2 permet une véritable optimisation de leurs compétences. En manque de confiance, Joachim Andersen a désormais une couverture pour faire parler sa principale qualité : les relances longues. Parfois maladroit mais en pleine renaissance, Marcelo peut dorénavant aller au duel sans laisser un trou dans son dos en cas d'échec. Quant au dernier axial, Denayer reste le pilier solide qu’il est déjà le reste du temps et, en sortie de banc, Marçal retrouve un rôle dans lequel il s’était affirmé l’année dernière. En outre, s'il faut lancer des jeunes, Oumar Solet serait tout à fait à son aise dans un tel système, lui qui aime porter le cuir jusque dans le camp adverse.
Enfin, ce renfort dans la défense s’accompagne aussi d’améliorations sur le front de l’attaque. S’ils sont théoriquement moins nombreux (deux attaquants contre trois habituellement), les attaquants sont suppléés par les latéraux qui offrent le surnombre. Ils sont donc davantage trouvés que durant les quelques séquences affreusement stériles que l’on a pu voir à Brest par exemple, match durant lequel l'OL a disposé du plus grand nombre d'attaquants cette saison. Surtout, le 3-5-2 permet de maximiser le potentiel de Memphis et Martin Terrier, tous deux meilleurs en tant que deuxième pointe qu’ailier. Le tout sans altérer le rôle de Moussa Dembélé et en poussant hors du onze les décevants Bertrand Traoré et Maxwel Cornet.
Dispositif situationnel ?
Nous avons pour l’instant pu observer le 3-5-2 à trois reprises. Sa mise en place a pu avoir des raisons différentes. Contre Paris, probablement une appréhension des dégâts causés par Neymar et la volonté d’y affecter un homme en particulier, tout en s’essayant à des latéraux plus libres pour contrer. Un manque d’ambition qui n’a finalement abouti qu’à une seule bonne séquence de quelques minutes et malgré tout à un but de Neymar. En revanche, le choix de réitérer l’expérience à Leipzig pouvait être motivé par une volonté de prendre cette équipe en miroir. En effet, il est parfois pertinent d’aligner le même dispositif contre une autre défense à trois lorsque l’on a de meilleures individualités. Également contre Julian Nagelsmann, Bruno Genesio l’avait fait au match retour face à Hoffenheim, avec plus de succès dans le jeu qu’à l’aller. Contre Saint-Étienne, enfin, peut-être une volonté de surfer sur un début de dynamique pour définitivement mettre la crise au tapis. Échec, mais il est difficile d’analyser un derby, et de surcroît un tel non-match des deux côtés.
Si, contre Leipzig, l’utilisation de ce système s’était avérée payante, faut-il pour autant en faire l’équipe type ? Probablement pas. D’abord parce qu’aussi importante et vivifiante fut cette victoire, on ne peut pas la dresser en match référence. Les Lyonnais ont eu des difficultés à jouer dans la moitié de terrain adverse. Et pour cause, avec un Lucas Tousart bien timide à la baguette, les circuits de relance passaient presque systématiquement sur les côtés. D’ailleurs, les deux buts sont plus à attribuer au bon jeu sans ballon lyonnais et ce pressing encourageant qu’à une production offensive prolifique. En soit témoin le nombre de passes depuis la zone 14 et les halfspaces, ce qui représente à peu près les trente derniers mètres : 79 pour Leipzig, 14 pour Lyon. Avec un score aux expected goals très équilibré et qui tourne même à l’avantage des Allemands selon la maison de statistique, ce sont finalement des Lipsiens très maladroits qui offrent la victoire aux Gones. Même si, encore une fois, elle n’est pas déméritée et reste l’issue d’un très bon match dans les intentions.
À voir et à revoir
Sylvinho semble donc avoir aligné ce dispositif en fonction des situations données. C'était une bonne idée, et Rudi Garcia fraîchement nommé verra peut-être l’occasion se représenter, mais cela ne devrait pas devenir dogmatique. Il ne semble d'ailleurs pas élever le 3-5-2 au rang de conviction. Et il est vrai que l’on aurait du mal à voir le système à trois centraux reconduit contre le reste de la Ligue 1. Efficace contre une équipe joueuse, il devient vite trop peu ambitieux voire contreproductif à la réception, par exemple, de Metz ou Dijon. Si le manque cruel et criant de créativité offensive sous le cours mandat de Sylvinho semblait universel au dispositif et plus dépendant de l’animation – car les mêmes problèmes au milieu demeuraient du 4-3-3 au 3-5-2 en passant par le 4-2-3-1 – ce serait se tirer une balle dans le pied que de perdre une munition avec un troisième défenseur central contre des équipes repliées.
Néanmoins, si l’on voulait s’imaginer, comme simple idée, que le 3-5-2 devienne la formation signature de l’OL lors du prochain mandat, quelques ajustements pourraient le rendre viable en toutes circonstances. Contre ces blocs bas, il faudrait alors invoquer un dispositif hybride où le plus axial des défenseurs centraux se verrait confier la tâche de numéro 6 quand l’équipe a le ballon, lequel ne serait pas aligné. Sa place vacante permettrait alors de rajouter un milieu plus créatif ou impactant, ou encore un attaquant supplémentaire. Les phases offensives ne seraient de fait pas impactées par un manque de personnel ou une frilosité trop grande, et l'équipe garderait une base à trois axiaux en cas de contre sans cantonner les latéraux à un rôle défensif.