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C'était bien

Le 20.08.2020 par MatthiasT

La saison fut rude. Entre espoirs envolés, résultats en berne, situation sanitaire et décisions ubuesques des instances dirigeantes, c’est à se demander de quelle planète est descendu ce formidable mois d’août 2020. Et si Robert Lewandowski ponctuait froidement sa fin, hier soir, en inscrivant le but du 3-0 munichois de cette demi-finale de Ligue des Champions, cette parenthèse enchantée restera dans les mémoires.

La croix et la manière

Flashback hivernal. Nous sommes le 10 décembre 2019. Le coronavirus ne dépasse pas la dizaine de recherches Google par jour, mais surtout, à la mi-temps de ce dernier match de poule de Ligue des Champions qui voit l’Olympique Lyonnais recevoir le RB Leipzig, les Gones sont menés 0-2 à la pause et sont virtuellement derniers de leur groupe. Un but (somptueux) d’Houssem Aouar et une seconde réalisation de Memphis Depay plus tard, l’OL arrache miraculeusement son ticket pour les huitièmes de finale de la plus grande des compétitions. Cependant, pas même le plus fou des esprits ni le plus fanatique des supporters ne voit en cette équipe, qui végète dans le ventre mou de Ligue 1 et côtoyait encore la zone rouge il y a quelques semaines, un groupe capable de se hisser au rang des quatre meilleures formations d’Europe.

De retour de la trêve, l’OL ne plait guère mieux à ses supporters et observateurs en championnat. L’expression « en dents de scie » enjolive même un peu trop cette saison et la grogne monte en tribune. Pourtant, c’est dans un tout autre costume que l’OL accueille la Juventus Turin, qui n’est certes pas des plus flamboyantes mais qui file vers sa neuvième Série A consécutive et compte en ses rangs le roi de la Ligue des Champions. Les Lyonnais parviennent effectivement à s’imposer face au champion d’Italie. Et ce n’est pas un miracle : le match est maîtrisé et le but de Lucas Tousart, mérité.

Plus de cinq mois plus tard – il va falloir expliquer ça à nos enfants –, l’ambiance du match retour est toute autre. La septième place fut plus ou moins légalement scellée et la finale de la Coupe de la Ligue perdue aux tirs au but. Mais il y a cette promesse d’un Final 8 à Lisbonne pour les quart-de-finalistes. De quoi animer l’été et représenter le dernier mince espoir de coupe européenne la saison prochaine. Ça tombe bien, l’OL est en ballottage favorable pour s’y rendre : il « suffit » de tenir le score à l’Allianz Stadium. Eh bien, malgré un doublé de Cristiano Ronaldo et grâce à un penalty de Memphis Depay, ils l’ont fait.

Camping paradis

Nous voilà donc à Lisbonne, outsiders d’un format unique de Ligue des Champions où les tours seront joués en une rencontre sur terrain neutre. Ainsi, l’OL n’est qu’à trois petits matchs de la promesse du petit doigt de Jean-Michel Aulas et accessoirement du plus grand exploit de son histoire. Trois matchs, oui, mais trois matchs au sein du tableau le plus relevé. Il faudra en effet se défaire de deux champions 2019, celui d’Angleterre, Manchester City, puis celui d’Espagne ou d’Allemagne, selon le vainqueur entre le Barça et le Bayern, pour décrocher sa place en finale.

Si les observateurs et les bookmakers ne donnent aucune chance à l’OL, nos Gones ne l’entendent pas de cette manière et, non contents de ne pas vouloir faire figuration, ils n’ont aucune intention de quitter Lisbonne de sitôt. Tout au long d’un match légendaire qui restera très longtemps frais dans nos mémoires, l’OL de Rudi Garcia musèle et se déjoue des aspirants au titre menés par Pep Guardiola, 3-1 score final.

#YAvaitCherMoy

À peine avons-nous le temps de digérer la nouvelle masterclass de Maxwel Cornet contre sa victime favorite – il faudra également expliquer ça à nos enfants – et le doublé de Moussa Dembélé en cinq minutes, qu’un autre gros morceau se présente. Le Bayern Munich toque à la porte. Impérial depuis l’arrivée d’Hansi Flick et invaincu depuis vingt-huit matchs, il vient d’écraser Barcelone d’un historique 8-2. La marche est haute.

Trop haute. On ne remue pas le couteau dans la plaie : comme face à Manchester City, les Lyonnais se paient le luxe d’un temps fort après le quart d’heure de jeu, mais chacun sait qu’aucune des trois occasions que se procurent Memphis Depay et Karl Toko-Ekambi n’aboutira, malgré l’alignement capricieux de la défense bavaroise. Le petit filet, le poteau droit et la jambe de Manuel Neuer retiendront pendant longtemps nos rêves du Graal. Dans la foulée, la fulgurance de Serge Gnabry trouve la lucarne d’Anthony Lopes. Passé ce moment, c’est un match perdu au mental. Cet enchaînement a fait mal et coupé net les jambes et le moral lyonnais. Face à un OL apathique, Gnabry récidive. 2-0 à la pause.

Un autre temps fort, moins conséquent cette fois-ci, ne suffit toujours pas à percer une défense munichoise qui s’est ajustée, même s’il y avait encore une fois la place. Les changements sont intéressants mais les organismes affaiblis : Lewandowski, sur corner, finit de cueillir l’OL. Loin du ridicule mais capables de mieux face à un Bayern supérieur sans être injouable, les Lyonnais perdent ce match et quittent la compétition. Merci pour l’épopée.

Mois d’août sans doutes

Car si cette odyssée nourrira des regrets, elle nous aura offert un match de légende, de la joie, des rêves et de l’insouciance, bref, un mois d’août mémorable. La parenthèse enchantée a beau s’être fermée, elle reste lisible et riche en enseignements. Et il serait bon de s’en servir pour construire l’avenir, en Ligue 1, quand il faudra créer le jeu plutôt que de le subir pour le retourner dans son sens. Tout à l’honneur de Rudi Garcia, un groupe solidaire et capable s’est créé. Des joueurs ont enfin crevé l’écran, certains ont retrouvé des couleurs et d’autres ont achevé de se réconcilier avec le public. Mais c’est surtout l’image d’un groupe que l’on retiendra. Mieux, un groupe que l’on a appris à aimer et dont on est fiers. Ce sont des bases aussi inespérées que solides pour travailler la saison prochaine.

Autre axe de travail, cette épopée a encore une fois mis en valeur le centre de formation du club. En effet, comment penser, en revoyant les matchs tailles patron de Maxence Caqueret et d’Houssem Aouar, que la clef est ailleurs que dans la jeunesse lyonnaise ? Si l’on peut lancer Caqueret dans des conditions si particulières, il n’y a aucune raison pour ne pas le faire avec douceur et confiance lors d’une saison normale. Considérons les jeunes avant de recruter, ils nous le rendent si bien !

Enfin, avec cette impossibilité de se rendre au stade, cette escapade européenne fut aussi fabuleuse hors des terrains. On retiendra bien sûr l’excellent arc narratif twitterien du camping de Décines et de son #YACherMoy (« il y a vraiment moyen »), mais surtout une ville dont le cœur a battu à nouveau, et à la chamade, en rouge et bleu. Preuve qu’avec un contenu correct sur le terrain, un brin de considération et une communication respectueuse, cette communauté de supporters est loin d’être l’ennemie de l’institution qu’on veut nous faire croire, et ne souhaite au contraire que son bien. Et son bien, elle l’a enfin obtenu durant ces dernières semaines où club, joueurs et supporters étaient en osmose. Alors encore merci pour ce beau parcours.

À propos de l'auteur

Cet article a été rédigé par MatthiasT, membre du Café du Commerce OL.